Rue Bricabrac, bdsm, masochisme
photo Campanita de Hojalata

EN ce mois où le théâtre est roi, en Avignon, où l'Enfer est beau et où Shakespeare parle néerlandais, ou à Ivry, ou partout sauf au Fou du Puits, il y a cette pensée de Diderot qui résonne, un comédien serait une structure vide dans laquelle on peut faire entrer n'importe quoi.

Je ne crois pas être comédienne, où si je le suis, je suis mauvaise dans cet art. D'où sans doute mon échec dans les quelques tentatives dans les jeux de rôles (les ou la, je ne me souviens guère qu'une soirée en tête à tête avec H*** où sur sa demande, j'avais revêtu un tablier de soubrette acheté, non sans embarras, dans une boutique spécialisée dans le vêtement professionnel, c'était amusant et piquant, ces pudeurs violables). Mais souvent, est-ce propre au masochisme, je me sens comme une structure vide dans laquelle j'attends que l'on fasse entrer non pas n'importe quoi, mais quelque chose.

J'ai souvent, ici ou ailleurs, au risque de radoter, parlé de la marionnette qu'une main adroite meut, et émeut, ou de la poupée (non point Galatée, surtout pas elle !) inerte qui attend un souffle, que dis-je une tempête organisée par les lanières, pour reprendre vie.

Ce quelque chose, des quelques choses, ce sont des sensations, des sentiments, des sensualités. C'est ce qu'une vie vaine (je ne parle pas de la mienne spécifiquement, mais de ce que propose la vie à l'enfant déjà, quelque chose d'assez peu excitant du moins à mes yeux d'alors et d'aujourd'hui, et ce n'est pas le saut à l'élastique, le zazen ou un boulot passionnant qui me feront changer d'avis) où le libre arbitre n'est peut-être qu'une vaste blague (à 99 %) ne peut offrir.

Les coups m'attendrissent, sûrement. La douleur me dessine, me remplit, et par une chimie qui m'échappe déploie une palette de petites et grandes molécules qui me recomposent, me reconstituent, me rassasient. Dès que la douleur s'estompe, que les muscles se détendent, que la peau retrouve sa couleur claire, le vide me dévore à nouveau. Mon masochisme fonctionne comme le désir. Mon masochisme est un désir béant.

Donne-moi quelque chose pour nourrir mon paradoxe.