Rue Bricabrac, bdsm, vrac

JE me suis mise en pause.
Ou plutôt, ça c'est mis en pause.
Automatique. Pas sympathique.

Ai-je encore autant d'enthousiasme à traquer les femmes réifiées sous leur abat-jour dans la vitrine d'un Monoprix, alors que je l'ai fait tant de fois, et que tant d'autres l'ont fait encore plus de fois ?

Ou de débusquer une carte postale coquine qui colle à l'actu de Maîtresse Rachida qui s'offre une nouvelle robe.

Ou de mettre en scène la chaise au dossier tapette, à ranger parmi les objets du culte.

Ou de chroniquer le dernier défilé Dior, total look j'enlève le bas, mais pas mes bas, visez un peu les jarretelles, à l'ancienne, la haute couture ne saurait se satisfaire de stay-up.

De dire combien la main qui sait, qui tient, qui aime, qui force l'admiration, m'est essentielle, combien certains regards qui ont envie de savoir, de forcer, de dresser m'excitent ?

De dire et redire que la soumission adorée n'a rien à voir avec la forcée, qu'une femme fouettée n'est pas une femme battue, et qu'on ne me mettra jamais un sac en papier sur la tête.

De me demander ce qu'on trouvera dans le cabinet secret de Ratzinger, du même niveau que la ceinture de Jean Polski.

À quoi bon radoter ?

L'impression de déjà écrit se fait de plus en plus fréquente.
L'absence de désir (libido autant qu'envie) est telle que l'amour m'est interdit, que les fantasmes sont à mille lieues, que le plaisir est impossible.
Mon corps m'emprisonne pire qu'un carcan, me pèse, repousse la jouissance autant que l'idée de jouissance.
Est-ce bien honnête de faire des jongleries avec les mots pour dépiauter une idée avec de la poudre aux yeux ? (Ou la poudre de riz qui sert au maquillage).

Sept ans que ce blog existe, un bel âge, tandis que le mien atteint aussi un multiple de sept, que j'aie rarement tourné sept fois ma langue dans ma bouche ou mes doigts sur le clavier, mais est-ce une raison pour écrire une septième fois les mêmes choses.

Et puis il y a la réalité, et ses pesantes contingences, tellement mordantes que j'en reste pétrifiée. Mes révoltes, mes coups de gueule (le coeur est absent), vont dans d'autres directions. La réalité me plombe, m'entrave, me désespère. Je ne suis pas joyeuse.

Je redécouvre des combats prioritaires, des lieux d'écriture plus nécessaires. Mon ego émietté ne trouve plus d'abri dans cette rue.

Je passe devant les Vanités exposées au musée Maillol, je m'y mire. Sachant que ce blogue n'est jamais que l'expression exacerbée d'un narcissisme abondant, le temps n'est-il pas venu d'écrire ailleurs, autrement, à d'autres heures ?

Ou convertir cette rue qui m'est et me reste chère au statut de ruelle, en profitant de la vogue du microblogging et de ses 140 signes. Je twitte pour garder le fil, je m'exprime en aphorismes, je gonfle le nano-ego.

Je ne sais.

(Texte mis en ligne 15 jours après avoir été écrit, c'est dire le rythme frénétique qui m'habite.)