Pupute

Au commencement était la publicité. Femmes faire valoir de jantes surbrillantes, bécasses lessivières, libidineuses secrétaires, la femme après avoir gagné une âme recevait quelques siècles plus tard ses galons d'objet de consommation.

Puis vint la télévision. Trouvant sans doute que les potiches habituelles ne suffisaient pas, elle a émis un message clair en alignant avec la mention réalité des brochettes de dindes vénales prêtes à se faire fourrer à longueur de Bachelor et d'Opération Séduction.

Et voilà que la grande distribution s'y met. Hier, à Monop', des brochettes de petits tops dans des couleurs hurlantes distillant des petites phrases niaises.
De prime abord.
Entre le rose et le turquoise, ce que je prenais pour des fringues de gamines (jusqu'à ce que je vois que ça taillait jusqu'au 44/46... je sais bien que l'obésité gagne nos contrées mais à 12 ans, tout de même...) me répétaient sournoisement "Quand tu seras grande, tu seras une pute ma fille."

Quelle mère criminelle offrirait ça à sa gamine ?
Quelle adulte collabo (et ce sont deux nanas qui ont imaginé ces horreurs !) porterait ces signes extérieurs de gourdasse ?

On y revient toujours, à la maman et la putain. Comme le oui et le non, les Beatles ou les Stone, mousse ou pif, fromage ou dessert, dieu ou Marx. Saleté de dichotomie fors laquelle point d'étiquette.

Putain, pute, c'est un vocable très en vogue dans le milieu sm. Dans le système maîtrique, notamment. Chienne ne suffisant pas, salope ayant fait son temps, pute connaît une nouvelle vigueur. (J'ai même récemment lu un "pupute", no comment, qui me fait penser à la fois à la chanson viens poupoule, ambiance baloche blair, et au "poupouche" récurrent dans le formidable Travaux de Brigitte Roüan.)

On va où avec ce pute ? C'est censé être une humiliation ? A quoi donc pense le monsieur dont le noeud relève le nez quand il traite sa partenaire de pute ? Parce que pute, c'est soit une profession, la plus vieille du monde à ce qu'on dit. Il ne viendrait à personne de traiter son voisin de percepteur ou de plagiste (quoique...). Alors pourquoi pute ? Pute, c'est aussi, dans un sens dérivé, une manière d'être, de prendre sans rien donner. Auquel cas, l'interpelleur se pose en micheton. Ou en maquereau, s'il espère trouver son dû. Dans les deux cas (qui n'en font qu'un, tant il est machton), ce n'est pas la femme (complice et consensuelle, pour accepter de jouer avec ce mot con si peu sensuel) qui est rabaissée mais l'homme qui se dévalorise. Sa compagne est dans le meilleur des cas un garage à bite, lui-même n'en étant qu'une parmi d'autres, dix, cent, mille... et dans le pire, une profiteuse qui l'instrumentalise avant qu'il n'ait eu le temps de faire ouf.


Shoes and Money par Kevin Hundsnurscher

C'est peut-être pour lui faire la nique que sur son corset, pupute (je ne m'en lasse pas), a brodé "Je suis une fille, j'ai le droit de porter des sandales dorées". Allez, chérie, les biftons, fais-en plutôt un matelas et éclate-toi toute seule une fois renvoyé le miché essoré chez bobonne !