Rue Bricabrac, bdsm, cuisine
Ayupov Timur

LE vocabulaire du gourmet et du masochiste emprunte les mêmes sentes.

On l'a vu avec une pub qui a fait mordre les chiennes de garde et qui était plutôt bon enfant (sauf à vouloir sucer la roue du politiquement correct et donc castrer non seulement le langage, la fleur devenant une compagne botanique, mais encore plus la pensée). La marque de la crème étant un prénom à la Perette, il était prévu de la lier, de la battre, de la fouetter.

À ce compte-là, bonne crème, double crème même, je signe des deux mains pour être Perette, toute fraîche.

H*** avait très vite compris combien le simple mot de "déguster", associé depuis quelque lecture approximative, au fouet ou à la cravache, me faisait littéralement saliver, me mettant la bave aux lèvres (comme je ne cherche pas à faire monter mes statistiques, je ne parle pas de cyprine), et il en usait avec beaucoup d'à propos, ni trop, ni trop peu, et je crois qu'avec lui, ce mot résonnait particulièrement parce qu'il le pensait vraiment, et ne s'en servait pas comme un gentil perroquet. Je numérotais mes abattis avant de passer à la casserole.

N*** prétend me faire mijoter, mais il oublie d'attiser le feu, alors je reste froide, il ne me fait même pas suer, c'est dire. Je marine ? Je ne crois pas. Court-circuit plus que court-bouillon !

Certains aiment mortifier leur partenaire pour l'attendrir, je ne marche pas, je préfère la méthode active, toutes mains dehors. Qu'on me pile, qu'on me pique, qu'on me pousse, qu'on me concasse. J'allais dire qu'on me panne, mais c'est tanne, et son sort de la cuisine, même si on reste du côté de la vache.

D'autres m'ont laissée, après des heures pile et face, cuite, pas saignante puisque comme exsangue, mais bleue. À point en même temps. La cuisine sm permet des licences que les fourneaux ne permettent pas.

Je n'irais pas comparer le bondage au saucissonnage, même si pour certains qui confondent shibari et ici bardé, il y aurait de quoi. Les connaisseurs des rondeurs féminines se plaisent à pétrir seins et fesses, monts et merveilles, car comme certains vins de qualité, j'ai du corps et de la cuisse. Pour faire lever la douleur, ou alors, l'enfoncer encore plus profond. Et c'est totale volupté que d'être ainsi traitée, comme une pâte souple et ferme. Avant de se faire embrocher à la hussarde.

Enfin, je frémis, je me détends, je me débride, multipliant luxure et gourmandise pour pécher au carré.

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