Je me souviens du parfum de ma mère. Femme. Il était passé de mode, et il y a quelques années, Rochas l'a remis sur le devant de la scène. Je l'ai senti, et je n'ai pas retrouvé ma mère.
Le parfum, c'est une histoire d'émotion, d'instant, une association d'idées. C'est pour cela que je ne parfume jamais quand j'ai quelque chose d'évidemment désagréable à faire (de l'hôpital à l'enterrement, en gros), de peur que cette odeur que j'aimais jusque-là ne reste liée à cette expérience irritante.
J'ai mille fois raconté comment mon premier coup de canne resterait toujours lié à l'exhalaison d'une fleur de jasmin qui s'est ouverte en même temps que je reprenais mon souffle. Jusqu'à des confusions olfactivo sensuelles. Et au gré de la floraison des jasmins que j'ai plantés depuis, je recherche cette émotion.
La pub étant ce qu'elle est, on choisit de plus en plus un parfum pour son image, son flaconnage, et moins pour son sillage (combien en ont encore, du sillage ?). Alors, pourquoi ne pas s'attacher au nom, et construire une petite muraille de messages.
Je suis née, pensais-je, l'année où Caron lançait Coup de fouet (rose, oeillet et poivre, à la fois rétro et moderne, la rose poivrée revient en force, notamment chez The Different Company). Ca me plaît bien, et tant pis si finalement, ce ne fut que trois ans après.
Sur la coiffeuse que je ne possède pas, dans mon boudoir virtuel, mon cocon de cocotte rococo, il y aura donc Coup de fouet. Mais pas seulement. Cravache de Piguet ne se trouvant plus (et s'il en restait un, je le laisse à Dahlia), Fracas du même fera l'affaire. Et aussi Rouge d'Hermès. (Il y en a eu un chez Chanel aussi, il y a très très longtemps, Coco était encore jeunette.) L'ambre à Sade (Nez a nez), je l'ai déjà, il me manque Le Marquis de Sade (chez Histoires de Parfums) que je n'arrive absolument pas à trouver. Et peut-être, pour être sûre que l'on comprenne bien mon propos, Empreinte de Courrèges. Et Bambou, de Weil.
Les chiennes doivent encore pleurer la disparition de l'éphémère Chaleur d'Animale, de chez Animale. Musc et ambre, c'est sûr que c'est de la zoophilie, ou pas loin ! Mais la jeune maison État Libre d'Orange leur a concocté un Putain des Palaces, odeur osée (tellement que je n'ose encore aller y pointer le bout du nez) où il ne manque, à en lire la composition, que la cyprine. Ou alors, un petit peu de cet exclusif Corps et Âme (Pierre Guillaume pour Parfumerie Générale)
Bien que ce ne soit pas l'année des T, celles qui aiment les allitérations ne manqueront par ce quarté vainqueur : Tumulte (Christian Lacroix), Tabu (Dana), Tentations (Paloma Picasso, mais mort au champ d'honneur) et Trouble (Boucheron). Et en guise de ponctuation, J'ai osé de Guy Laroche.
En vrac, un bouquet de Libertine de Viviene Westwood, Metal de Paco Rabanne, Nu d'Yves Saint Laurent, Ô de Lancôme (le problème chez Lancôme, c'est qu'il mettent des circonflexes sur tous les o, c'est leur signe distinctif), Shocking de Schiaparelli et Silences de Jacomo.
(On dit que les parfums n'ont pas de sexe, les nouveaux parfumeurs, notamment de niche, se refusent à cette différenciation, mais classique que je suis, je m'en suis tenue à ceux dits pour femmes. Et je n'ai pas imaginé la panoplie du dom, entre Egoïste de Chanel, Marquis de Anglia Perfumery, Strengh d'Anthony Logistic, qu'ils se démerdent, hein, ils sont dominants, pas besoin de leur expliquer par le menu.)
En revanche, je n'oublie pas les dominas, très gâtées par de toutes nouvelles fragrances, comme Maîtresse, d'Agent Provocateur, joli flacon, ou Lady Vengeance de la nouvelle marque Juliette has a gun, avec une senteur peu agressive et très vanillée, et enfin, dans la série rouge de Comme des garçons, Guérilla et Harissa.