DANS le temps, quand j'avais le coeur mieux accroché, je lisais, évidemment indignée, mais soucieuse de connaître mes ennemis, les rapports d'Amnesty International, dans les années 70, du temps des colonels à lunettes noires, grecs ou chiliens, quand le roi du garrot, Franco, n'était pas encore mort.

Je me faisais déjà fouetter avec délices, mais n'était pas capable d'employer alors le mot torture parce qu'une fois par an, j'avais sous les yeux le détail de ce que des bourreaux sadiques (au sens le plus propre, c'est à dire le plus sale, salaud et criminel, et pas du tout sexuel quoique rien ne disait de ce qui se passait dans le pantalon de ces professionnels). Aujourd'hui que je ne les lis plus, sans pour autant cesser de cotiser pas plus que de me tenir au courant des infamies de mes contemporains, j'arrive à donner au mot torture des connotations aimantes. Quand c'est lui, le bourreau, et que je l'ai supplié de me mettre à mal. Mais j'arrive à dénoter un peu, à recevoir des coups de canne et de fouet en oubliant l'orient lointain, parce que de celui-ci, je n'ai que le tapis volant qui m'emporte vers mes paradis piquants, loin de ce réel qui m'englue.

Rue Bricabrac, bdsm, torture

Et puis, paf, une BD, la récupération, je craque (pour ceux qui douteraient du sens de ce craquage, c'est du côté de la nausée qu'il faut chercher, et des yeux sales). (Ç'aurait pu être pire, la couv', z'auraient pu se branler en la lapidant, une sorte de nouvelle marquisade, roc'n'bukkake.)