Rue Bricabrac, bdsm, fait divers, homicide
Photo Lapinfille

ÇA commence comme une petite annonce sur un site BDSM, ça se termine comme une chanson de Brel. (Il s'agit en vérité d'un ancien fait divers destiné à illustrer ce péché capital qu'est la luxure, dans le cadre d'une série de la rubrique "Grand angle".)

Une jeune femme d'une trentaine d'années, en costume de soubrette, est découverte morte et portant des traces de strangulations au rez-de-chaussée d'une location transformée en donjon.

On me rapporte qu'une soumise (épanouie jusqu'à l'hystérie) aux mains d'un homme marié a loué, à sa demande, un studio qu'elle a, toujours à ses frais, équipé en donjon. Mon interlocutrice doute qu'il ne s'en serve qu'avec elle.

L'enquête dénoue les fils, la jeune femme était la soumise d'un notable du coin, ainsi que de sa première concubine et soumise, plus âgée, éperdue d'amour pour lui, qui pour l'occasion, s'était faite maîtresse. Elle aurait convoqué la jeune pour une punition, raté son bondage, laissé la victime seule comme cela se fait fréquemment et retrouvé 10 mn plus tard la soubrette toute bleue. On parle de jalousie. Homicide involontaire.

Combien de maîtres envoient leur soumise à la recherche de chair fraîche, la number one se découvrant pour l'occasion des nouvelles pulsions, tourmentant de conserve avec son maître la nouvelle venue. Évidemment, tout se passe bien, nulle jalousie. Juste la première qui se bourre de Nutella (par exemple, tout le monde ne tue pas). Ou la seconde, quand elle n'est pas décérébrée, qui tire sa révérence.

L'avocat a déclaré, à propos de sa cliente, coupable mais victime "Ces relations triangulaires étaient perverses, néfastes, très sinistrogènes."

Une annonce de couple, copiée/collée à la volée : "Recherche - En Particulier une femme soumise et masochiste, pour relation suivie et privilégiée à trois." Ou encore "Lui : dom exclusivement, 1m.80, 70 kg - Elle : soumise (ou domina avec jeune femme ou couple) 1m.70, 60 kg."

Les habitués parisiens de leurs jeux sont venus à la barre. Esclaves et maîtres. Lunettes de soleillisés, perruqués, enfoulardisés, casquettés, un peu comme les témoins chez Delarue. À la fin des débats, l'entrepreneur du cru, tandis que son amante risquait la prison, a entraîné ses amis mémètres ou mémères démasqués. "Allez, au bistrot, je vous paye un pot !"

Une jeune femme raconte sa sinistre histoire sur son blog. Elle a rencontré un homme, s'est donnée à lui comme dans une chanson des années 80, le fist s'est fini dans le sang, il ne maîtrisait rien, sous l'emprise de l'alcool. On serait tenté de lui dire que si elle avait pris le soin de lire le blog de son partenaire (qui aujourd'hui joue les agneaux voués à la vindicte par des vilains méchants ligués contre lui, si imaginatif, si beau, si intelligent, si supérieur à tous ses contempteurs...), elle aurait pu entre les lignes deviner la mythomanie, la haine de l'autre et de soi, la psychopathie... (mais de la même manière que les aigreurs d'une divorcée de président, les propos post love-story sont toujours à prendre avec des pincettes).

Tout ça pour pas grand-chose, juste pour le sourire que j'ai eu en imaginant quelques Dafs, Stephen, Marquis, ici photographiés en pantalons de cuir, ventre rentré et sous leur meilleur profil, là en lunettes Emmanuelle Kahn, perruque de poupée Corolle, parlant dans leur barbe pour dire que non, monsieur le juge, tout cela était badin et soft, pensez, juste des petites innocences entre amis, Sade kissa... Si cela se trouve, c'est un de ceux-là lui un jour m'a abordée par un "bonjour chienne".

(Calypso semblant mal recevoir ce texte qui ne lui est pas essentiellement consacré - voir les commentaires, je viens de retirer le lien vers son blog.)