VITE, vite, il ne reste plus que quinze jours pour aller voir l'exposition Denise Bellon à la galerie Inknight. Des négatifs tirés pour la première fois, des inédits de celle dont on connaissait les portraits de Beauvoir ou de Langlois (éventuellement via le film que Chris Marker lui a consacré il y a quelques années).

Rue Bricabrac, bdsm, fétichisme
photo Denise Bellon

Denise Bellon a, pendant les années trente à cinquante, photographié des modèles ou ses amies, dans le plus simple appareil, parfois à peine voilées, ou corsetées d'une large ceinture, beautés anonymes et désirables, callypiges et innocentes. Elles posent comme on se propose, avec une ingénuité qui enlève tout soupçon d'impudeur. En décor naturel ou dans son appartement, qu'importe, le sens de l'étrange de Denise Bellon s'impose. Il tient à presque rien, un regard, un détail, un angle, une courbe. Compagne de route du mouvement surréaliste, elle avait évidemment ce goût du bizarre, sans ostentation pourtant.

Nus et désirs, tel est le titre. J'aime bien cette idée de désir, qui ressort dans la beauté simple des clichés. Aux antipodes du pornglam qui nous inonde depuis les années 80. Rien de clinquant, mais du charnel triomphant. Un noir et blanc qui nacre les peaux. Le fétichisme en creux mais terriblement présent. Et le trouble naît devant ces photographies.

Désirs de la photographe, des femmes qui posent, des visiteurs. Désirs d'être, en chair cette fois-ci, la femme nue de Meret Oppenheim sur qui on dînait à l'orée des années soixante. Sentir la griffe d'une fourchette, le pincement de doigts étrangers.

Rue Bricabrac, bdsm, fétichisme
photo Denise Bellon

Et de là, quittant ces fruits, traverser la Seine, aller voir les merveilleux Arcimboldo, oublier la FIAC, trop foire décidément, pour zigzaguer dans les galeries d'ici et là, grapiller des émotions dans des cadres plus feutrés. Imaginer une écologie de la consommation d'art.