Je croise, entre inconscient et Morphée, des hommes, le plus souvent inconnus qui me troublent.

Je n'ai au réveil que peu de souvenirs de ces orgasmes qui ne m'ont pas réveillée. À moins que, moite et coite, je ne me réveille avant l'acmé, (idée de) coïtus (déjà) interruptus, sentiment suave et frustré.

Une nuit, j'ai joui quand j'ai auditionné, en anglais, morte de trac, Le roi Lear (je ne suis pas comédienne, je ne connais pas une ligne de Lear même si la pièce m'est familière) pour un metteur en scène (dont il est vrai que, dans la réalité, la voix seule me transporte...).

Une autre, un danseur au corps parfait me prenait comme un garçon, mon échine entre ses dents.

D'autres fois, c'est plus flou, il y a du cuir, des lanières, des mains infatigables, des agaceries préliminaires, une tension ténue, une excitation épaisse. Rien d'autre, juste l'agacement, l'envie, l'ambiance, le penchant, l'imagerie, qui se nourrissent et s'autosuffisent. En position fœtale, je me love dans ces sensations diffuses.

Alors, je m'étire, je me lève et, toute la journée, je poursuis mes songes de la nuit, des rêves dont il ne reste que des bribes, comme des filaments de barbe-à-papa poussés par une tempête qui ne laissent ni trace, ni goût, juste une odeur de sucre.

Et à toi qui n'est pas dans ma tête, je demande sans mots ou avec des phrases maladroites, de me rendre, sur et dans la chair, ces chimères que le sommeil m'a refusées.