Il m'installe dans un coin stratégique, comme une petite princesse précieuse, avec une vue imprenable sur le thé‰tre des événements. Ca me va bien. Je suis terriblement mateuse. Et ma jouissance commence par anticipation. Je vois qu'il a sorti la cravache, et le menaçant chat ˆ neuf queues. La cravache, c'est ce que je préfère. J'aime quand il m'en badine, m'émiettant, me ventilant façon puzzle, m'envoyant en l'air, m'éparpillant en mille et une particules de plaisir.

J'adore aussi l'étau de sa main, cette manière unique, solide et douce, d'enserrer ma taille, de me manipuler comme si j'étais une plume, de me réchauffer, de m'allumer. S'il me caresse avec tendresse, c'est sans détour qu'il m'impose la pose.

Il approche son briquet, tout feu tout flamme, la chaleur s'approche, je sue un peu. On peut dire que je mouille. Je me réveille de ma torpeur songeuse, toute jouasse, j'en esquisserais presque un pas de polka. Ca va être ma fête, enfin ! J'en avais marre de faire tapisserie, ma mèche commençait même ˆ prendre la poussière.

Sinueuse, sensuelle, parée d'or et d'outremer, je me dresse, serpentine, des promesses de feu dans le coeur, une Salomé débarrassée de ses voiles. Enfin droite et fière, je lui envoie un petit signe de fumée qui dit Vergiss mich nicht.

Sur ce, avec un sens du timing digne de la capsule ˆ Polo, elle arrive, trop altière pour une soumise, triomphante avec sa chute de reins arrogante en signe extérieur de sexualité, fièrement cambrée, le cul fait pour la fessée. Elle le sait qu'elle est diablement irrésistible, qu'aucune main ne peut lui résister, elle en use, en abuse. Elle le tient par ces deux lobes. Son cul lui sert de coeur. Elle n'a même pas besoin d'injonction sévère, ni de claques préliminaires pour se courber et lui proposer sa croupe amorale, bombée, un peu grasse et p‰le. Ce cul proposé crie de toute son ‰me « mets-moi le feu !". Elle est lˆ pour cela. Et pour plus encore. Le plus, c'est lˆ que j'ai ma partie ˆ jouer. Parce que le feu, ce n’est pas pour me vanter, c'est mon rayon.

J'en brûlais d'impatience.

Je me suis léchée les babines, la cire luisante, ˆ la voir rougir progressivement, gémissant de plaisir sous la férule métronomique, il se prenait pour Gene Krupka, d'ailleurs, le CD qui passait était un best of du batteur de légende. Et elle était un tambour aux mille sonorités. À eux deux, ils composaient une symphonie concrète, tap taboum, bang schlak, shiiiz, très "viens-petite-fille-dans-mon-spanking-trip" qui m'émoustillait, la flamme swinguant de tous c™tés, fumante comme une chaudière fourragée.

Comme elle gigotait trop, elle le faisait exprès, elle est coutumière de ce genre de minauderie du train arrière, il l'a sèchement arrimée serrée aux pieds du lit, un coussin sous le ventre pour mettre encore en plus en valeur ce derrière avide de supplice. Et les claques de reprendre leurs percussions rythmiques, tap bang, schlak shiiiz... boum tandis qu'elle y allait en colorature, encore, c'est trop, stooooop, ne t'arrête pas... Elle en avait les fesses ˆ l'envers, la chérie.

J'en frétillais de plus en plus de la flamme, répétant mentalement mon entrée comme une diva, special guest star du soir, bonsoir. Mon r™le, je le sais par coeur, serait, quelle ironie, de rendre ces chairs rutilantes ˆ leur alb‰tre d'origine. Car blanche comme une vierge, comme un cygne, comme une vestale, comme une communiante, comme un lys... je suis. Il aime ce genre d'humour. Les flambeaux amarantes, les rats de cave purpurins, les lumignons vermillons, les candelas incarnats, il s'en fiche comme de sa première bandana. Je l'attire par mon c™té cierge et salope ˆ la fois. Bient™t, je serais une gangue nacrée qui tout en incendiant le derche déjˆ bien dérouillé ferait dispara”tre les traces du ch‰timent.

Je pouvais toujours frétiller. Sans un même un regard vers moi, il attrape la cravache d'une main, le chat de l'autre, et comme un sorcier dans quelque rituel dansant lui flanque une tournée qui m'a donné le vertige. Et pourtant, il m'en faut beaucoup. Impuissante, verte de jalousie, condamnée ˆ me faire tartir, je me consume tandis qu'il l'embrase. Bref, je brûle pour des prunes. Je ne peux même pas bailler, sous peine de mourir.

Ajoutant, l'outrage ˆ l'insulte, il lui fait l'amour, devant moi, elle pousse ces petits cris d'effraie qui ponctuent d'habitude mon oeuvre. Et lui, l'ingrat, l'égo•ste, le jouisseur, pas un regard pour moi, pas un clin d'oeil, pas un signe de connivence. Demander ˆ une bougie de tenir la chandelle, si ce n'est pas du sadisme, ça !

Bien plus tard, alors que je n'étais plus que l'ombre de moi-même, aussi fluette et naine qu'une bouginette d'anniversaire, en se tortillant pour remettre son string, sans même me laisser le temps d'un grésillement réprobateur, elle m'a soufflée.