Zentai

Encore des images qui ravivent des fantasmes oubliés.

N'étant ni exhibitionniste, ni mélangiste, peu voyeuse, pas du tout gangbangueuse, mais flirtant avec toutes ces idées, je m'étais alors imaginée livrée à différents bourreaux qui ne pourraient pas plus me voir que moi les regarder, puisque j'aurais été vêtue d'un académique (justaucorps à manches et jambes longues) comme on en trouve chez Repetto ou Stanlowa...

... mais un tout petit plus intégral, puisque emballant aussi pieds, mains et tête. Et le plus fin possible, pour que les sensations restent intactes (parlant de sensation, avez-vous remarqué, les filles, à quel point un collant ou un bas d'un nylon de peu de deniers accentue les vagues d'une caresse ?).

Ainsi caparaçonnée et offerte, fermée mais vulnérable, je pouvais me retrouver dans quelque Luna Park de dominateurs pour toutes sortes de jeux en aveugle. Impudique et ma pudeur intacte, je ne perdrais pas une miette de la force dun coup, la torsion d'un pincement, l'étau d'une morsure, la précision d'un doigt sur mon starter... (La question de la frustration des hommes ne se posait pas, c'est mon fantasme, et j'en fais ce que je veux, c'est là la supériorité du fantasme sur la vie.)

Pour finir ce fantasme en beauté, mon amant dominateur à moi, une fois terminée la séance collective, pouvait parfaitement déchirer la combinaison aux seins, aux fesses, yeux et bouche, au sexe, ou pas, ou me laisser ignorer aussi longtemps que possible que c'était lui (me punissant si je ne reconnaissais pas ses mains assez vite) et que nous étions seuls.

Et voilà qu'avant-hier, tombant sur les ciseaux d'un coiffeur et un numéro de FHM, j'apprends l'existence du zentaï (je ne suis pas une lettrée du bdsm et des fétiches associés, juste une pratiquante, pas une croyante, ce qui me tient éloignée des chapelles... mais pas du plaisir).

Je ne peux tout d'un coup me défaire, malgré l'exhumation du fantasme qui soudain le réactive, beau et brillant comme un sou neuf, de l'idée que le zentaï, c'est la capote poussée à l'extrême, le safe sex jusqu'au moindre germe qui pourrait traîner au bout d'un doigt, une invention de Howard Hughes le paranoïaque visionnaire, une manière, sous prétexte d'exalter les sens, de se prêter sans se donner.

Pourtant, pour retarder le contact, pour sentir le froid d'un ciseau contre son menton ou sa cuisse, pour être sortie de son cocon parcelle de peau après centimètres carrés de chair, ça donne terriblement envie.

N'est-il pas furieusement Missoni, ce petit modèle à rayures ?